Le décès d’un animal, qu’on a aimé et qui nous a aimé, est un moment déchirant. Comme tous les vétérinaires, et plus particulièrement depuis que je m’intéresse aux accompagnements de la fin de vie, je peux dire que je côtoie de près la douleur et la peine vécues par les familles. Je suis témoin de la souffrance et du sentiment de culpabilité, très souvent ; des remords, parfois.
Le deuil animalier : une réalité émotionnelle profonde
Le lien entre les humains et leurs animaux familiers transcende souvent les mots. Lorsqu’un animal décède, la perte peut être dévastatrice. Les animaux ne sont plus simplement des biens matériels, mais des membres à part entière de la famille. Lorsqu’ils partent, la douleur ressentie est authentique, et il est alors essentiel de comprendre que pleurer la perte d’un animal est une réaction naturelle, avec une réalité émotionnelle profonde qui mérite d’être reconnue et respectée.
Des endeuillés isolés
Pourtant, le deuil animalier est encore souvent minimisé, voire ignoré dans nos sociétés. Il est encore fréquent que les gens considèrent comme “sentimentales” les personnes souffrant de la perte de leur animal ou qu’on leur reproche de faire de l’anthropomorphisme. Combien de personnes ont ressenti plus de peine au décès de leur animal qu’à celui d’un membre de leur propre famille, mais n’ont pas osé l’avouer à leurs proches ? À l’opposé, combien de personnes se sont entendues dire qu’elles feraient mieux d’aller dans un refuge chercher un nouvel animal pour aller mieux ? Ces paroles, dites souvent avec bienveillance, ne font qu’accentuer ce sentiment d’être incompris. Elles renient le lien unique qui unissait la personne à son animal. S’ensuit un risque d’isolement car les endeuillés ne veulent plus être confrontés à ce type de discours et préfèrent se taire.
Les vétérinaires : premier soutien des familles
En tant que vétérinaires, nous jouons un rôle crucial dans le processus de deuil animalier car nous sommes les premiers à pouvoir prendre en compte et promouvoir la singularité de chaque lien entre un humain et son animal. L’euthanasie, bien que souvent nécessaire pour soulager la souffrance d’un animal, peut être une expérience déchirante pour les propriétaires. Nous devons non seulement être compétents sur le plan médical, mais aussi empathiques face à la douleur émotionnelle des familles. Fournir des informations sur le deuil animalier, offrir des ressources pour le soutien émotionnel et montrer de l’empathie contribuent à faciliter le processus de deuil ensuite. Il me semble donc que notre profession a un rôle essentiel dans la validation et le soutien de ceux qui pleurent la perte de leurs compagnons.
Honorons les liens pour briser le tabou du deuil animalier
Je suis convaincue qu’honorer le lien qui persiste même au-delà de la mort, contribue à apaiser la douleur et à reconnaître la validité du deuil animalier. Alors, honorons nos animaux. Parlons d’eux, parlons de nos deuils. Brisons le tabou qui entoure le deuil animalier pour contribuer à légitimer cette expérience difficile et à offrir un espace où les personnes peuvent exprimer leur chagrin sans honte ni jugement. En partageant nos histoires, nous contribuons à créer une société plus compréhensive, où l’amour et la perte, qu’ils soient humains ou animaux, sont respectés de la même manière.